Le rapport CAM est une tentative louable de scientifiques anglais, mandatés par l’organisation à but non lucratif «Arthritis Research UK», d’apporter un peu plus de lumière sur le grand nombre de thérapies complémentaires ou «alternatives» pour les diagnostics de polyarthrite rhumatoïde, d’arthrose (en général, dans les études le plus souvent du genou) et de fibromyalgie. CAM signifie «complementary alternative medicines», c’est-à-dire des médicaments «alternatifs» complémentaires. Les chercheurs ont passé au crible les traitements disponibles en Grande-Bretagne jusqu’en novembre 2011.
Traitement scientifique
Pour ce faire, les chercheurs ont d’abord examiné en détail la littérature scientifique et pris en compte les études dont les résultats avaient été publiés jusqu’en mai 2011 inclus. Ils ont ensuite évalué toutes les thérapies pour lesquelles des études de haute qualité scientifique étaient disponibles dans des revues médicales anglophones connues. Le critère pour l’efficacité était une réduction des douleurs (c’était le cas pour la plupart des études), une amélioration des capacités quotidiennes ou une amélioration de la qualité de vie. Les chercheurs ont renoncé à évaluer les thérapies pour lesquelles il n’existait pas d’études cliniques dites randomisées. Cela ne signifie pas que ces méthodes thérapeutiques ne sont pas efficaces, mais simplement qu’il n’est pas possible de faire une déclaration scientifiquement fondée à ce sujet.
Un comité composé de spécialistes de la médecine factuelle, de rhumatologues, de spécialistes des médecines alternatives ainsi que de représentants des patients a examiné les études, évalué les résultats et noté l’efficacité des méthodes considérées sur une échelle de 1 à 5. Les évaluations 1 à 2 signifient qu’aucune efficacité significative n’a pu être démontrée – ou qu’il n’existait qu’une seule étude clinique randomisée dans laquelle l’effet n’a pas pu être prouvé avec certitude. Les évaluations 3 à 5 indiquent que la substance étudiée est vraisemblablement efficace. Plus il y avait d’études randomisées avec le même résultat et plus le nombre de patients suivis était élevé, plus le classement sur cette échelle était élevé.
Les effets secondaires en ligne de mire
Le groupe d’experts a également pris en compte le risque d’effets secondaires. Le classement a été effectué à l’aide d’un feu tricolore:
Rouge signifie un risque élevé d’effets secondaires graves. Le remède chinois à base d’herbes Duhuo Jisheng Wan obtient cette classification, car l’un de ses ingrédients a été classé comme cancérigène.
Jaune indique un risque légèrement accru (indication de risques individuels potentiellement dangereux).
La couleur verte symbolise un risque faible: aucun effet secondaire grave n’est à prévoir, mais il est tout à fait possible qu’une personne ne tolère pas la substance.
Le rapport CAM contient des descriptions détaillées et des faits sur les thérapies. Il est écrit pour les patients afin qu’ils puissent s’y retrouver dans la jungle des possibilités offertes, malheureusement uniquement en anglais. On y trouve également des indications sur les problèmes fondamentaux liés à l’évaluation des approches de la médecine complémentaire. En font par exemple partie le manque de connaissances sur les mécanismes d’action (en théorie et en pratique), l’effet par rapport aux thérapies/médicaments conventionnels, la constance de la préparation des différentes substances (en particulier pour les produits à base de plantes qui n’ont pas toujours la même composition), le dosage le plus efficace ainsi que la question des interactions possibles avec d’autres médicaments ou substances et le risque d’effets secondaires. Pour de nombreuses thérapies, les connaissances dans ces domaines sont très lacunaires. En principe, le risque d’effets secondaires est certes faible. Mais comme il n’est pas nul, le médecin et le pharmacien devraient dans tous les cas savoir ce que chaque patient consomme régulièrement afin de pouvoir réagir en cas d’effet secondaire.
L’évaluation «jaune» attribuée à la sécurité de la griffe du diable est due à des rapports individuels faisant état d’une tendance accrue aux saignements et à des troubles du rythme cardiaque. Certaines substances ont entraîné des effets secondaires sur l’estomac et l’intestin, même si la substance a obtenu une évaluation «verte». Les personnes prenant durablement un traitement de médecine alternative devraient donc faire contrôler régulièrement leurs valeurs sanguines afin de pouvoir détecter rapidement les effets secondaires rares sur le foie, les reins ou la formule sanguine.
Une croissance constante des données
D’un point de vue actuel, quelques études de haute qualité scientifique se sont certainement ajoutées, de sorte que l’évaluation a peut-être changé. Il est donc nécessaire d’actualiser régulièrement une telle évaluation. Ainsi, pour la vigne du tonnerre divin, la chondroïtine, la glucosamine et la diacéréine, des études cliniques randomisées et des métaanalyses, qui permettent une évaluation positive de ces substances, ont par exemple été ajoutées en 2015. La mise à jour de l’évaluation scientifique devrait toutefois être réservée aux experts: les formes de thérapie complémentaires ou même alternatives ne doivent être acceptées que si elles ont prouvé leur efficacité par rapport aux thérapies comparatives (placebo, analgésiques) dans des études correspondantes. «Arthritis Research UK» révise donc continuellement le rapport et met à disposition les évaluations les plus récentes sur son site Internet.
Quelle est maintenant la conclusion pour les patients? Toutes les méthodes considérées ne doivent être comprises que comme des thérapies complémentaires, dont les risques d’effets secondaires doivent être pris en compte par les personnes concernées. En aucun cas, elles ne peuvent être considérées comme des alternatives aux thérapies médicales classiques: pour aucune des substances, il n’existe d’indication qu’elle puisse arrêter ou même seulement atténuer le processus de destruction possible des articulations et des organes par l’inflammation permanente, comme les médicaments biologiques de la médecine conventionnelle peuvent par exemple le faire.

Alternative en cas d’arthrose?
En cas d’arthrose ou de fibromyalgie, les méthodes complémentaires peuvent effectivement être considérées comme une alternative, car il n’existe pour ces maladies que des thérapies médicamenteuses à l’efficacité limitée. Un essai thérapeutique peut valoir la peine dans certaines circonstances – à condition que le médecin traitant en soit informé. Car comme pour tout médicament utilisé de manière permanente, les médecines complémentaires nécessitent des contrôles du fonctionnement des organes (analyses de sang/d’urine) à intervalles réguliers.
Pour un traitement qui soit le plus efficace possible et qui entraîne le moins d’effets secondaires possible, il est indispensable que le médecin connaisse toutes les thérapies utilisées par la personne concernée. En principe, il n’y a pas d’arguments valables de mon côté pour ne pas également essayer des thérapies pour soulager la douleur plus rarement utilisées dans la médecine conventionnelle. La condition est toutefois de garder à l’esprit le risque d’éventuels effets secondaires. Cela vaut surtout pour la combinaison avec des médicaments antirhumatismaux ne contenant pas de cortisone. Les principes de base du traitement général des maladies articulaires restent les mêmes: faire le plus d’exercice possible sans trop forcer, prévoir des pauses de repos, avoir une alimentation plutôt végétarienne (le moins de viande possible). Ils s’appliquent indépendamment du fait que l’on utilise uniquement des médicaments «classiques » ou également des méthodes «alternatives».
Pr Stefan Schewe est conseiller médical de la rédaction de «mobil» et rhumatologue interniste à Munich et Ebersberg (Allemagne).
Source: Ligue allemande contre le rhumatisme, rheuma-liga.de/rheuma/alltag-mit rheuma/naturheilkunde/cam-report
Cet article a été publié pour la première fois dans la revue «vertical» No 92/Mai 2022.